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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2008-10-07 | [This text should be read in francais] | Submited by Guy Rancourt
À Georges Lorin.
Rire nerveux et sardonique Qui fais grimacer la douleur, Et dont le timbre satanique Est la musique du malheur ; Rire du paria farouche, Quand, d'un geste rapide et fou, Il met le poison dans sa bouche Ou s'attache la corde au cou ; Rire plus amer qu'une plainte, Plus douloureux qu'un mal aigu, Plus sinistre qu'une complainte, Rire atroce aux pleurs contigu ; Sarcasme intime, inexorable, Remontant comme un haut-le-coeur Aux lèvres de la misérable Qui se vend au passant moqueur : Puisque, dans toutes mes souffrances, Ton ironie âpre me mord, Et qu'à toutes mes espérances Ton explosion grince : « A mort ! » Je t'offre cette Fantaisie Où j'ai savouré sans terreur L'abominable poésie De ta prodigieuse horreur. Je veux que sur ces vers tu plaques Tes longs éclats drus et stridents, Et qu'en eux tu vibres, tu claques, Comme la flamme aux jets ardents ! J'ai ri du rire de Bicêtre, À la mort d'un père adoré J'ai ri, lorsque dans tout mon être S'enfonçait le Dies irae ; La nuit où ma maîtresse est morte, J'ai ri, sournois et dangereux ! - « Je ne veux pas qu'on me l'emporte ! » Hurlais-je avec un rire affreux. J'ai ri, - quel suprême scandale ! - Le matin où j'ai reconnu, À la Morgue, sur une dalle, Mon meilleur ami, vert et nu ! Je ris dans les amours funèbres Où l'on se vide et se réduit ; Je ris lorsqu'au fond des ténèbres, La Peur m'appelle et me poursuit. Je ris du mal qui me dévore ; Je ris sur terre et sur les flots ; Je ris toujours, je ris encore Avec le coeur plein de sanglots ! Et quand la Mort douce et bénie Me criera : « Poète ! à nous deux ! » Le râle de mon agonie Ne sera qu'un rire hideux ! (Maurice Rollinat, Les Névroses, 1883)
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