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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-11-09 | [This text should be read in francais] | Submited by Guy Rancourt Sous bois, dans le prĂ© vert dont il a broutĂ© l'herbe, Un grand bouc est couchĂ©, pacifique et superbe. De ses cornes en pointe, aux noeuds superposĂ©s, La base est forte et large et les bouts sont usĂ©s ; Car le combat jadis Ă©tait son habitude. Le poil, soyeux Ă l'oeil, mais au toucher plus rude, Noir tout le long du dos, blanc au ventre, Ă flots fins Couvre sans les cacher les deux flancs amaigris. Et les genoux calleux et la jambe tortue, La croupe en pente abrupte et l'Ă©chine pointue, La barbe raide et blanche et les grands cils des yeux Et le nez long, font voir que ce bouc est trĂšs vieux. Aussi, connaissant bien que la vieillesse est douce, Deux petits mendiants s'approchent, sur la mousse, Du dormeur qui, l'oeil clos, semble ne pas les voir. Des cornes doucement ils touchent le bout noir. Puis, bientĂŽt enhardis et certains qu'il sommeille, Ils lui tirent la barbe en riant. Lui, s'Ă©veille, Se dresse lentement sur ses jarrets noueux, Et les regarde rire, et rit presque avec eux. De feuilles et de fleurs ornant sa tĂȘte blanche, Ils lui mettent un mors taillĂ© dans une branche, Et chassent devant eux Ă grands coups de rameau Le vĂ©nĂ©rable chef des chĂšvres du hameau. Avec les sarments verts d'une vigne sauvage Ils ajustent au mors des rĂȘnes de feuillage. Puis, non contents, malgrĂ© les pointes de ses os, Ils montent tous les deux Ă cheval sur son dos, Et se tiennent aux poils, et de leurs jambes nues Font sonner les talons sur ses cĂŽtes velues. On entend dans le bois, de plus en plus lointains, Les voix, les cris peureux, les rires argentins ; Et l'on voit, quand ils vont passer sous une branche, Vers la tĂȘte du bouc leur tĂȘte qui se penche, Tandis que sous leurs coups et sans presser son pas Lui va tout doucement pour qu'ils ne tombent pas. (Jean Richepin, La chanson des gueux, 1876)
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