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L\'orgie parisienne ou Paris se repeuple
poetry [ ]

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by [J.N._Arthur_RIMBAUD ]

2006-09-08  | [This text should be read in francais]    |  Submited by Rotaru Andreea



O lĂąches, la voilĂ  ! DĂ©gorgez dans les gares !
Le soleil expia de ses poumons ardents
Les boulevards qu'un soir comblèrent les Barbares.
Voilà la Cité belle, assise à l'occident !

Allez ! on préviendra les reflux d'incendie,
VoilĂ  les quais, voilĂ  les boulevards, voilĂ 
Les maisons sur l'azur léger qui s'irradie
Et qu'un soir la rougeur des bombes Ă©toila !

Cachez les palais morts dans des niches de planches !
L'ancien jour effaré rafraßchit vos regards.
Voici le troupeau roux des tordeuses de hanches :
Soyez fous, vous serez drĂŽles, Ă©tant hagards !

Tas de chiennes en rut mangeant des cataplasmes,
Le cri des maisons d'or vous réclame. Volez !
Mangez ! Voici la nuit de joie aux profonds spasmes
Qui descend dans la rue. O buveurs désolés,

Buvez ! Quand la lumière arrive intense et folle,
Fouillant à vos cÎtés les luxes ruisselants,
Vous n'allez pas baver, sans geste, sans parole,
Dans vos verres, les yeux perdus aux lointains blancs,

Avalez, pour la Reine aux fesses cascadantes !
Ecoutez l'action des stupides hoquets
DĂ©chirants ! Ecoutez sauter aux nuits ardentes
Les idiots rĂąleux, vieillards, pantins, laquais !

O coeurs de saleté, bouches épouvantables,
Fonctionnez plus fort, bouches de puanteurs !
Un vin pour ces torpeurs ignobles, sur ces tables...
Vos ventres sont fondus de hontes, ĂŽ Vainqueurs !

Ouvrez votre narine aux superbes nausées !
Trempez de poisons forts les cordes de vos cous !
Sur vos nuques d'enfants baissant ses mains croisées
Le Poète vous dit : " O lĂąches, soyez fous !

Parce que vous fouillez le ventre de la Femme,
Vous craignez d'elle encore une convulsion
Qui crie, asphyxiant votre nichée infùme
Sur sa poitrine, en une horrible pression.

Syphilitiques, fous, rois, pantins, ventriloques,
Qu'est-ce que ça peut faire à la putain Paris,
Vos Ăąmes et vos corps, vos poisons et vos loques ?
Elle se secouera de vous, hargneux pourris !

Et quand vous serez bas, geignant sur vos entrailles,
Les flancs morts, réclamant votre argent, éperdus,
La rouge courtisane aux seins gros de batailles
Loin de votre stupeur tordra ses poings ardus !

Quand tes pieds ont dansĂ© si fort dans les colères,
Paris ! quand tu reçus tant de coups de couteau,
Quand tu gis, retenant dans tes prunelles claires
Un peu de la bonté du fauve renouveau,

O cité douloureuse, Î cité quasi morte,
La tête et les deux seins jetĂ©s vers l'Avenir
Ouvrant sur ta pĂąleur ses milliards de portes,
Cité que le Passé sombre pourrait bénir :

Corps remagnétisé pour les énormes peines,
Tu rebois donc la vie effroyable ! tu sens
Sourdre le flux des vers livides en tes veines,
Et sur ton clair amour rÎder les doigts glaçants !

Et ce n'est pas mauvais. Tes vers, tes vers livides
Ne gêneront pas plus ton souffle de Progrès
Que les Stryx n'Ă©teignaient l'oeil des Cariatides
Où des pleurs d'or astral tombaient des bleus degrĂ©s."

Quoique ce soit affreux de te revoir couverte
Ainsi ; quoiqu'on n'ait fait jamais d'une cité
Ulcère plus puant Ă  la Nature verte,
Le Poète te dit : " Splendide est ta BeautĂ© !"

L'orage t'a sacrĂ©e suprême poĂ©sie;
L'immense remuement des forces te secourt ;
Ton oeuvre bout, la mort gronde, Cité choisie !
Amasse les strideurs au coeur du clairon sourd.

Le Poète prendra le sanglot des InfĂąmes,
La haine des Forçats, la clameur des Maudits ;
Et ses rayons d'amour flagelleront les Femmes.
Ses strophes bondiront : VoilĂ  ! voilĂ  ! bandits !

- Société, tout est rétabli : - les orgies
Pleurent leur ancien rĂąle aux anciens lupanars :
Et les gaz en délire, aux murailles rougies,
Flambent sinistrement vers les azurs blafards !

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